Du 15 au 17 août : le Kawe Ijen à Java

Publié le par refabael.over-blog.com

Samedi 15 août 2015

Avant de quitter ce joli village, nous avons rdv dans un petit atelier qui fabrique la poudre de café. La pièce fait moins de 40 m2. D'un côté, il y a la torréfaction. Oh, c'est très simple, en apparence : un cylindre tourne au dessus d'un feu et entraîne 100 kg de graines pour qu'elles cuisent uniformément. Tout l'art est de surveiller la vapeur qui s'en échappe, sa couleur, son odeur. Au bout de 2 h à peu près, il vide le cylindre par terre sur une dalle en béton. Il craque quelques grains être ses doigts ; le grain se brise net : c'est cuit. En étalant le café et en évacuant l'air chaud avec un ventilateur, le café refroidit. Vient l'étape du broyage. Deux moulins couplés peuvent transformer les 100 kg de grains dans l'espace de l'après-midi, en une fine poudre. Entre le début et la fin des opérations, il y a une perte de 25 %. Le travail à façon des 100 kg coûte 500 000 rp à celui qui amène ses graines à torréfier.

Avant de prendre le taxi pour Permuteran, j'achète des petites rations de Sayur ( légumes bouillis, noix de coco et un peu de sucre) pour faire patienter les estomacs jusqu'au soir.

A Permuteran les hôtels sont trop cher et en plus, la mer est trop forte pour la plongée. On change rapidement tous les plans : on ira d'abord à Java pour l'ascension du Kawe Ijen, puis nous reviendrons vers Lapan Lalang en espérant que le dieu des mers se soit calmé.

On file donc jusqu'à Gillimanuk, ville portuaire sans aucun charme, où nous trouvons des chambres dans nos prix. Nous passons la soirée sur la plage à jouer au Frisbee avec 5 jeunes indonésiens. Au loin, au soleil couchant, le Kawe Ijen nous appelle. Rémi se fait faire une jolie coupe de cheveux à l'indonésienne : il va faire craquer toutes les minettes de Bali, c'est sûr !

Pour le repas, nous trouvons un warung vraiment rustique. Les dames qui font la cuisine n'ont jamais du voir de touristes dans leur échoppe et tous les yeux sont rivés sur nous : mais qu'est-ce qu'ils font là ? Ils sont perdus ?

Non loin de là, un internet café nous permet de mettre un petit mot à Stéphanie Thyssen pour son anniversaire. Vous êtes tous loin de nous mais on pense à vous ! Valerie s'arrache les cheveux car elle voulait mettre des photos sur le blog, mais elle perd tout son travail juste avant de le sauvegarder !!!

Dimanche 16 août 2015

Aujourd'hui, on se met dans l'ambiance de la rando qui nous attend : d'abord les courses pour un soir et un matin puis la préparation de sacs légers car nous devons trouver (normalement) de quoi nous loger au pied du volcan, mais il nous faut quand même des vêtements chauds car le Merapi culmine à 2800 m. En fait on monte seulement au bord du cratère (Kawe en indonésien) à 2200 - 2300 m. De plus, on va faire l'ascension de nuit pour observer les fameuses flammes bleues, résultat de la combustion des vapeurs de souffre et pour ensuite admirer le lever du soleil là haut. Ce sont ces vapeurs qui cristallisent et déposent de grosses quantités de souffre, objet de toutes les convoitises. Actuellement la concession est chinoise et une myriade de porteurs suent à grosses gouttes et s'usent les poumons dans les vapeurs toxiques, en remontant de lourdes chargés de ce minerai.

Ce volcan fait partie d'un ensemble volcanique dominé par le Raung, celui qui a fumé ces derniers temps et bouché la visibilité sur l'aéroport de Denpassar ; le massif est traversé par une route qui va vers Bondowoso puis Jember : 55 km de route de montagne, raide et sinueuse pour atteindre le col. Après avoir fait un saut de puce au dessus du détroit qui sépare Bali de Java, nous attaquons donc cette route. Notre chauffeur, qui est aussi guide à ses temps perdus, nous suggère de faire l'ascension le soir car il y a beaucoup moins de monde. Hormis le fait que le lever de soleil se transforme en coucher, on ne voit pas d'inconvénients à cette proposition, sauf qu'il faut quand même être vigilants : dans la nuit, il faudra trouver le chemin du retour et à Java, le soleil se couche une heure plus tôt, car on recule d'une heure (il y a 3 fuseaux horaires entre l'est et l'ouest de l'île).

C'est donc décidé : à peine sortis du taxi, vers 15h, nous réservons deux tentes pour la nuit et partons pour l'ascension vers 15h30. Nous payons la taxe d'entrée aux autorités locales qui nous demandent d'être de retour à 21h au plus tard. Il y a 600 m à faire et en une heure et quart, nous sommes au bord du cratère. Au fond, on distingue le lac acide de couleur verte et les fumerolles de souffre qui se dégagent de la terre, autour. Il faut descendre quand la nuit tombe, pour voir les flammes bleues, donc on a le temps de monter encore un peu, en contournant le cratère et de profiter de la merveilleuse luminosité du ciel embrasé par le soleil couchant. Au loin, on distingue le Raung je pense et, plus loin, l'argopuro.

Les avis divergeaient sur l'option à prendre (ascension le soir ou le matin) et la dispute éclate au sommet. Bon de toutes façons, on y est ... Un vent glacial nous transperce et pour nous réchauffer, on décide de faire un petit feu, à l'abri dans une ravine, autour duquel nous enterrons la hache de guerre. On aura besoin de solidarité et de cohésion en bas dans le cratère. On se lance alors dans la descente aux enfers ...

Techniquement, ça ne pose aucun problème. Nous avons mis nos masques en tissu et en papier pour diminuer la sensation désagréable des gaz souffrés. Tout près des flammes maintenant, nous nous arrêtons pour les admirer. C'est là que les choses se corsent : tout à coup, le vent tourne, mais on ne le voit pas tout de suite car il fait nuit ; on s'en aperçoit seulement quand on commence à avoir du mal à respirer, pris dans le nuage de souffre. Ca nous pique les yeux et la gorge, mais le pire c'est cette sensation de suffoquer ; nous tentons de remonter, mais le chemin est difficile à suivre dans ces conditions. Bastien et Rémi sont partis plus bas, avant l'arrivée du nuage de gaz et ils ne répondent pas. Elian commence à pleurer, alors je me dis que le seul moyen de sortir de là, c'est de descendre plus bas encore pour être en dessous de la fumée. De toutes façons, il faut rejoindre les deux autres garçons. J'empoigne Elian, Valerie et Fanny m'emboitent le pas et nous descendons à toute vitesse en direction du lac. Bientôt, j'entends Rémi et Bastien qui répondent a mes appels. Deux porteurs, restés en bas, nous aident à nous protéger temporairement des nuages de fumée en nous invitant dans leur abri et en mettant un masque à gaz sur la bouche d'Elian, mais ça va déjà beaucoup mieux car nous sommes en dessous du nuage maintenant. Les porteurs nous indiquent un chemin moins exposé aux fumées pour remonter et nous ne nous faisons pas prier : nous remouillons nos masques pour la remontée et démarrons aussi sec après avoir chaleureusement remercié nos compagnons d'infortune. rgence pour nous, c'est de remonter le plus vite possible. On a rejoint le chemin de la descente maintenant et à part quelques fois, l'odeur est maintenant tout à fait supportable. Mais elle va nous suivre quand même jusqu'au début de la descente du cratère. Là nous nous arrêtons et respirons un grand coup : ouf, on est sortis de ce trou à rats. Les deux porteurs, eux, vont certainement passer la nuit dedans pour attaquer les portages avant le jour et profiter ainsi de la fraîcheur. Mais comment font-ils ? Leurs yeux étaient rougis et pleins de larmes du fait des gaz, comment vont-ils tenir dans cet enfer pendant toute une nuit ? Comment font-ils pour y retourner tous les jours ? Autant de questions qui me viennent maintenant à l'esprit.

Mais Elian en a encore plus que moi, il est un peu traumatisé et se demande encore comment tout ça aurait pu finir, il a besoin de parler, d'évacuer le stress de cette mésaventure. Alors on parle, on tente d'expliquer ce qui s'est passé, ce qui aurait pu arriver, comme par exemple tomber dans les pommes, ce qu'on aurait pu faire pour éviter tout ça ; les questions continuent de fuser : " c'est quoi tomber dans les pommes ?"

Bastien fait le dur mais il a été moins exposé au nuage et Remi lui rappelle qu'il n'était malgré tout pas très fier en bas ...

Après ce petit arrêt "thérapeutique", nous descendons à vive allure jusqu'au col où nous arrivons vers 20h30. Là, le camp s'est quelque peu transformé depuis notre départ dans l'après midi : au moins 500 jeunes sont sur place, dansent autour d'un grand feu, au son d'une musique bien chargée en basses. Plus loin, repartis dans un grand pré, d'autres petits groupes ont fait des feux devant leur tente et discutent ou chantent. Hormis les basses qui nous font trembler tout le corps, l'ambiance est très sympa. En fait, ils sont là pour fêter l'indépendance, demain, 17 août. Cette année, c'est un peu spécial car ces événements qui ont fortement marqué la population avec des combats sanglants contre les forces hollandaises se sont déroulés il y a 70 ans, en 1945.

Demain, ou plutôt tout a l'heure, vers 1h du matin, ils monteront tous au bord du cratère pour brandir le drapeau rouge et blanc, symbole de l'unité indonésienne.

Pendant qu'on réalimente un feu abandonné et qu'on prépare le repas avec Bastien et Remi, les autres aménagent les deux tentes. On va se cailler, on le sait déjà, car on n'a pas pris nos duvets, croyant que nous trouverions un vrai toit, comme d'habitude. On arrive à en louer 4 et on se répartit ça comme on peut. Ce qui nous fait rire, c'est qu'on sait que tout le monde va se cailler, car personne n'est vraiment équipé pour passer une nuit à 1600 m d'altitude. Je pense qu'il fait autour de 8 degrés.

Le feu n'était pas aussi abandonné qu'on pensait. Entendant le crépitement des flammes et aussi un peu nos paroles, des jeunes sortent peu à peu de deux tentes tout près. On est désolés, car on sait qu'ils vont se lever tôt demain, mais eux sont ravis de passer cette soirée avec nous ; ils nous posent des tas de questions, et nous invitent bientôt à chanter et danser avec eux. Ils ont vraiment la pêche les indonésiens ! Une vitalité incroyable émane de ce peuple, de cette jeune nation. Remi discute encore longtemps avec eux avant d'aller se coucher.

Certains viennent de Probolingo, sur la côte nord de Java, d'autres sont étudiants à Malang, grand centre universitaire de Java. Le plus fort que nous voyons avec Valerie, tard dans la soirée, alors que les enfants sont déjà couchés, ce sont 3 jeunes attablés à un stand autour d'un café pour se réchauffer ; ils sont en chemise et grelottent, mais rigolent quand même. Ils ont choisi de ne même pas dormir. Leur tente et leurs duvets sont restés dans leur voiture. Le froid les engourdit et les cloue à leur place. Ils ont encore 2 h à tenir avant de commencer l'ascension que nous venons de faire. Eux, ils viennent simplement de ... Jakarta !!! 20 h de voiture ont été nécessaires pour rallier ce coin pommé.

Avant de se coucher, on jette une dernière couverture, louée in extremis dans les stands qui bordent la route, dans la tente des enfants, et surtout sur Elian.

Valerie et moi, on a un petit duvet fin pour deux, alors on se blottit l'un contre l'autre et on attend ainsi le petit matin. De temps en temps, on s'assoupit, mais la plupart du temps on lutte contre le froid ; ambiance survie !! Enfin 8 degrés c'est encore pas le mont blanc hein !

Lundi 17 août 2015

Le petit matin est très agréable. On n'a quasiment rien dormi de la nuit et je rallume tout de suite le feu pour attendre les premiers rayons du soleil. Les indonésiens et les touristes descendent peu à peu du volcan, ils marchent comme des revenants ; certains vont se coucher dans leur tente, d'autres s'affalent sur l'herbe, d'autres enfin se préparent un petit déjeuner. La musique ne tarde pas à se remettre en route vers 7h et réveille mes petits et ma tendre et douce qui viennent se réchauffer devant mon feu. Après un petit dej copieux, c'est la séance farniente qui commence. Les rayons du soleil ont remplacé avantageusement le foyer et nous obligent même très vite à nous mettre à l'ombre. Dire qu'il a fait si froid cette nuit !

Sur la grande prairie, un espace grand comme un demi-terrain de foot a été aménagé, sans tentes. Une petite dizaine de personnes, dont une en uniforme répètent des gestes et des paroles. Il semble qu'il va y avoir un lever de drapeau. Vers 10h, alors que nous n'y croyons plus, une foule se rassemble devant le mât, sortant d'on ne sait où et s'organise en pelotons. 4 pelotons de 50 personnes au moins, se mettent tout naturellement sous le commandement de 4 personnes. Ces 4 sections se mettent ensuite sous le commandement d'une sorte de capitaine qui lui-même s'en remet à une sorte de général. Les discours s'enchaînent maintenant, rappelant les fondements de la république indonésienne, mais aussi transportant la foule vers l'avenir de ce jeune pays. Peu de gens assistent à la cérémonie hormis nous, car, tout simplement, ceux qui sont encore là sont dans la compagnie au garde à vous.

Nous sommes impressionnés par ce patriotisme et cette fierté qui a incité tout naturellement les gens présents à se mettre sous les couleurs de leur nation.

Lentement, 3 jeunes scouts indonésiens, volontaires pour cette cérémonie, hissent le drapeau avec solennité. Doucement d'abord puis remplissant tout l'espace sonore, tous les gens réunis entonnent l'hymne national. Quelle émotion d'être là avec eux pour ce grand jour ! Quelques personnes couvrent l'événement en prenant des photos et viennent nous voir pour recueillir nos impressions. Mes garçons jouent les playboys avec les filles indonésiennes qui veulent toutes des photos avec eux. Fanny n'est pas en reste de son côté et je surveille ça d'un air paternel.

C'est le moment des adieux et des félicitations pour leur belle fête.

Tellement contents qu'on s'intéresse à eux, les organisateurs nous glissent un repas dans le sac juste avant notre départ.

De retour au port, nous prenons juste le temps d'acheter nos petits sacs de riz et de bakso (boulettes de viande de bœuf, ou d'abats de bœuf quand on a moins de chance) et nous voilà à nouveau sur le bateau en train de traverser le détroit.

Le bakso passe bien pendant la traversée, mais ce n'est pas le cas pour tous : au pont inférieur, un joli vomis sur une rambarde fait bien rire les enfants, car bien sûr, une personne vient s'accouder dessus sans faire exprès, beuurkkk !

Arrivés à Bali, les taxis nous prennent tout de suite en main. On a beau essayer de s'en défaire, pas moyen. Il faut dire qu'ils sont efficaces. Ils finissent par nous trouver un logement pas trop cher, et une agence de plongée pas trop loin de notre hébergement. Ils sont incroyables : ils se connaissent tous et ont toujours une solution à nous proposer.

Yuda (Hide Home stay) nous accueille chez lui comme sa propre famille. Le seul inconvénient, c'est que la route principale passe à 10 m des chambres. Pendant que je vous écris, ma petite famille marche courageusement vers la mer (à 2 km) et réussit, malgré une eau pas très claire à observer de grands coraux et une foule de tous petits poissons. Je finis par les rejoindre pour un petit repas au bord de l'eau. Pendant le repas, je ne sais pas qui a mangé le plus : les moustiques où nous ?

Fatigués de cette journée, nous craquons et faisons appeler Yuda qui, gentiment (mais pas gratuitement) quitte momentanément son travail dans l'hôtel tout proche et nous dépose chez lui. Il faut être en forme pour la plongée demain !

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